jeudi 8 décembre 2011

Les frères esthètes

Le nouveau spectacle proposé ce week-end au centre culturel Tjibaou part d'un très beau projet. Celui de profiter de la venue d'immenses danseurs, de virtuoses du mouvements, des athlètes du saut de chat pour travailler avec Richard Digoué sur sa dernière création, Le Sacre du Printemps. L'échange est intéressant d'autant plus que l'un des danseurs, Gilles Porte est un enfant du Caillou. Les styles se mêlent, les danseurs aussi, les formes s'entrechoquent, tous les ingrédients sont réunis pour que Le sacre du printemps joué en 2012 pour le festival waan danse soit une petite merveille d'originalité et de maestria.
Cependant, on ne peut pas en dire autant des "âmes frères". Certes, la virtuosité s'impose comme s'impose à nous une vérité absolue. Les corps sont magnifiques, le mouvement est maitrisé à la perfection, on ne peut que rester admiratif d'une telle performance. Une heure de danse à ce rythme ! Peu de danseurs pourraient en faire autant. Julien Lestel, le chorégraphe et danseur de sa propre compagnie résume lui même son spectacle "Mon propos est d'emmener le spectateur vers une émotion suscitée par la gestuelle et de l'entraîner dans une dynamique où se côtoient puissance, sensualité et poésie mises en valeur par la technique virtuose des interprètes". En bref, une heure de mouvements très travaillés au service d'une esthétique de la perfection. Le propos des deux amis qui s'aiment et se soutiennent moralement et physiquement est du même ordre, il n'a d'intérêt que dans la complaisance d'une belle chorégraphie de couple.
Quelques éléments intéressants ont toutefois été soulevés comme ces tambours enivrants presque tribaux présents dans la première partie du spectacle qui font écho à un escalier psychédélique projeté en fond de scène et deux ou trois jeux de dédoublement, de visions étranges et d'amorces d'animaux imaginaires. Bribes de déformation du corps, de bizarreries humaines qui font la beauté et la profondeur d'un spectacle vivant. "Parce que le beau est toujours étonnant, il serait absurde de supposer que ce qui est étonnant est toujours beau" disait justement Charles Baudelaire.